Se reconnecter à la Joie
Mais chez l’adulte, la plupart du temps, quelque chose en gêne l’expression. Et il est plus facile d'évoquer ce qui peut empêcher la joie que ce qui peut la provoquer, puisqu’elle semble survenir là où on ne l’attend pas. Qu’est-ce qui empêche alors la Joie ? Son principal obstacle me semble la gêne, le fait de se sentir empêché (par quelqu’un ou par soi), de se retenir mais aussi l’attente de quelque chose de (trop) précis ; on retrouve cela parfois dans la sexualité. Ce sera donc essentiellement le contrôle, la prévoyance excessive, les attentes, les interdits, les espoirs, les croyances. Et finalement tout ce que nous avons ajouté à la réalité telle qu’elle est. Nos commentaires, les « il faut... », « je devrais... », « ce serait mieux si... » , « J'ai intérêt à... », « si seulement... », sont tous des entraves à la Joie. Elle est d’ailleurs facilement confondue avec le contentement ou la satisfaction qui sont justement le résultat de la résolution positive de quelque chose de souhaité, d’espéré ou d’attendu.
Pourtant nos joies les plus simples peuvent survenir dans des circonstances assez communes.
Par exemple, du soulagement de quelque chose, d’un évènement inattendu que l'on ne contrôle pas. Éventuellement elle peut survenir suite à la résolution d'une situation pour laquelle nous n'avions plus d'espoir particulier. Elle peut ainsi provenir d'une forme de libération.
Vous vous sentiez bloqué, coincé, vous vous étiez fait une raison, et puis, de manière soudaine, vous vous retrouvez libéré de cette situation. Il est alors fort possible que le soulagement inespéré de retrouver votre liberté d’agir vous procure un sentiment de Joie. Un autre exemple peut être la découverte de quelque chose d'agréable, de beau et qui constitue une belle surprise. La Joie est issue dans ce cas de notre capacité à nous émerveiller. Elle provient d'une ouverture, d'une capacité à se laisser surprendre par la vie, sa richesse et sa subtilité. Elle est le résultat d'une connexion avec un état naturel. Observer comment les enfants s’étonnent et s’émerveillent de leurs découvertes lors de leurs explorations. Et là vous aurez un aperçu tangible de ce qu'est cette Joie naturelle.
Ainsi le retour à la Joie passera plutôt par un état de chercheur, quelqu'un prêt à découvrir des choses nouvelles et étonnantes, retrouver une curiosité et une capacité à s'émerveiller. Cela provient aussi d'un sentiment de liberté, c'est-à-dire d'oser écouter ses envies, d'oser expérimenter et d ‘accepter l’idée de se tromper. Sans même se poser la question d'ailleurs si l’on se trompe ou pas, tout en suivant, au fond, son Cœur. Donc pour cultiver la Joie, il s'agira notamment d'apprendre à s'écouter de nouveau, mais aussi à écouter autour de nous. Observer, chercher à découvrir, explorer, tester, expérimenter. Tout cela sont des ingrédients qui peuvent nous permettre d’accéder à la Joie.
Je vous invite maintenant à chercher dans vos souvenirs un moment où vous avez ressenti une joie simple ou profonde. Essayez de vous souvenir dans quel état d'esprit vous étiez. Qu'est-ce qui se passait dans cette période de votre vie ? Quels étaient les enjeux ? Quelles étaient les difficultés ? Quel était votre état d'esprit ?
Et peut-être vous souviendrez-vous aussi de ce qui a produit cette joie, quel effet cela a pu produire en vous. Et si vous avez la chance d’avoir le beau souvenir d'une grande Joie, je vous invite à le considérer comme précieux. En vous remémorant ce souvenir, vous pourriez approcher un peu de l'état favorable à la joie, y compris dans le quotidien quand c'est un peu compliqué.
Finalement la Joie m’apparaît comme une montgolfière qui, réchauffée par la chaleur du Cœur, ne demande qu’à s’élever dans les cieux pour peu que l’on la déleste suffisamment des poids qui l’entravent. Écouter nos envies et agir librement, sans chercher à savoir où cela nous mène, embrase le Cœur. Le délestage pour s’élever se fait, quant à lui, grâce à la prise de Conscience de ce qui freine nos actions...
Puisse cette réflexion nous inviter à prendre davantage les choses comme elles se présentent et à lâcher un peu le contrôle, à nous émerveiller des choses simples, à chercher le beau et à expérimenter à notre manière, sans crainte du jugement ou de se tromper. Je nous souhaite de belles retrouvailles avec cette Joie naturelle et toute la vigilance nécessaire pour ne pas la laisser s’entraver par certaines anciennes habitudes.
À l’occasion du printemps, ce moment où la Vie se manifeste avec force après la pause hivernale, j'aimerais vous parler de la Joie. Elle est à la fois quelque chose d’essentiel et de simple. On l’observe facilement chez les jeunes enfants, même si les adultes peuvent aussi la contacter parfois. La Joie n'est pas vraiment une émotion. Puisqu'une émotion est quelque chose qui, la plupart du temps, est activé en nous par un déclencheur extérieur faisant écho à notre passé. La Joie n'est pas en lien direct avec notre histoire mais découle davantage de notre nature profonde. Elle est un sentiment qui fait partie de l'humain et qui est donc un de ses états naturels quand les conditions favorables sont réunies pour la ressentir.


Raphaël Mebold, le 21 mars 2025